Le pot après les fleurs
Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour que les bonnes intentions développées pendant la crise se transforment en déclarations que nous avons du mal à qualifier : inopportunes, maladroites, irréfléchies, provocatrices,…
Toujours est-il que, lors de la journée qui met à l’honneur la Fédération Wallonie-Bruxelles (qui plus est, fêtait ses 50 ans), son Ministre-Président était particulièrement en verve. Le même qui, il y a quelques mois, passait la pommade aux personnels de l’enseignement (reconnaissant leur courage, leur volonté et leur ténacité) a sorti un discours particulièrement inquiétant.
Ainsi, la réforme de la formation initiale des enseignants (que nous réclamons depuis trop longtemps et qui ne cesse d’être remaniée -ou plutôt vidée de son sens- et reportée) ne s’accompagnera pas d’une revalorisation barémique. Sérieux coup de canif dans le contrat signé avec le Gouvernement précédent puisque le protocole d’accord sectoriel que nous avons signé prévoyait que:
«Le Gouvernement S’ENGAGE, dans le cadre de la réforme de la formation initiale des enseignants, à mettre en place un groupe de travail chargé, D’ICI LA SIGNATURE DU PROCHAIN PROTOCOLE de:
- définir, selon des modalités préservant la soutenabilité financière de la FWB, un nouveau barème pour les enseignants détenteurs du nouveau diplôme situé entre les barèmes 301 et 501 actuels pour les enseignants issus des sections 1, 2 et 3 de la formation initiale des enseignants;
- déterminer les modalités et conditions selon lesquelles les enseignants détenteurs d'un master en spécialisation auront accès au barème 501;
- déterminer à quelles conditions les enseignants formés selon l'actuelle formation initiale pourraient avoir droit au nouveau barème;
- garantir, dans ce cadre, une tension barémique à ancienneté égale d'au moins 25 % pour les chefs d'établissement par rapport au nouveau barème ou par rapport au barème 501 s'ils proméritaient celui-ci dans leur fonction de recrutement».
Rappelons au passage qu’un accord sectoriel signé avec un Gouvernement engage tous ceux qui lui succéderont. Ce groupe de travail n’a jamais vu le jour… Ce n’est pas faute de l’avoir rappelé ! Vous en tirerez vous-mêmes les conclusions.
Il est peut-être bon de rappeler ici que, mis à part les sauts d’index et les différentes corrections en matière de prime de fin d’année, les personnels de l’enseignement n’ont plus connu d’augmentation de leurs barèmes depuis plus de dix ans ! Certains s’étonneront encore de la pénurie grandissante due au manque d’attractivité de la profession dont le salaire fait inévitablement partie.
Mais les propos ne se limitent pas à cela. Le Ministre-Président va un cran plus loin lorsqu’il aborde le volume des prestations et la taille des classes. Pour lui, plus de souplesse à ce niveau serait une solution.
On croit rêver. C’est loin d’être un rêve.
Il n’est pas loin le temps où l’image véhiculée à propos des enseignants était celle de «glandeurs» profitant d’horaires «cool» et de deux mois de vacances chaque année ! Quelle caricature qu’on croyait révolue!
C’est une des raisons pour lesquelles nous nous sommes associés sous conditions dans une profonde réforme du système scolaire qu’on appelle le «Pacte pour un enseignement d’excellence». Les objectifs précis doivent servir l’Ecole de demain et faire de ceux qui la fréquentent des citoyens responsables et capables de tracer leur voie dans un monde de plus en plus dual.
Les personnels ont apprécié les fleurs reçues il y a quelques mois ; ils renvoient le pot!
Les articles du CSC-EDUC n°153 illustrent les propos de cet éditorial plus en détail. Je vous en souhaite une bonne et saine lecture.
Roland Lahaye